La consommation d’alcool et de stupéfiants s’envole dans les entreprises
En huit ans, les tests positifs à l’alcool ou aux stupéfiants en entreprise ont augmenté de +107 %, selon une étude du spécialiste du dépistage iThylo par APERLI. Les données montrent que les dépistages réalisés après 17h enregistrent un taux de positivité à l’alcool multiplié par deux par rapport aux autres plages horaires. Ces résultats pointent une consommation banalisée, souvent silencieuse, parfois collective, qui s’ancre dans les fragilités structurelles du monde du travail et met en lumière les angles morts des politiques de prévention classiques.
Ce que l’étude révèle, ce n’est plus une série de cas isolés, mais une dynamique massive et persistante. En huit ans, le taux de positivité aux substances psychoactives (alcool + stupéfiants) est passé de 2,6 % en 2017 à 5,3 % en 2025, soit une augmentation de 107 %.
Parmi les substances les plus en hausse, la cocaïne illustre à elle seule cette mutation des usages : 13 fois plus de cas positifs en 2025. Si cette drogue semblait autrefois réservée à certains milieux festifs ou cadres urbains, elle s’est aujourd’hui installée jusque sur les chantiers, dans les entrepôts ou les ateliers, comme en témoignent plusieurs cas groupés.
Le cannabis reste la substance la plus dépistée (1,8 % des tests positifs), avec une répartition plus homogène dans le temps. L’alcool, quant à lui, enregistre un net pic en soirée, notamment après 17h et les vendredis, avec des taux jusqu’à deux fois supérieurs à la moyenne.
Une rupture dans les usages
L’étude observe une hausse nette des cas positifs à partir de 2022, marquant une rupture claire avec la période pré-Covid. Entre 2017 et 2021, les taux restaient relativement stables et linéaires. En comparaison, la période 2022–2024 affiche +43 % de cas positifs à l’alcool et +52 % aux stupéfiants, toutes substances confondues.
Cette évolution laisse penser que la crise sanitaire a entraîné un basculement durable des usages, lié à l’accumulation de stress, à la perte de repères collectifs, à l’isolement prolongé et à l’émergence de formes d’épuisement psychique persistantes.
L’étude met en évidence une vulnérabilité marquée des travailleurs précaires – notamment les intérimaires – face aux consommations d’alcool et de stupéfiants en milieu professionnel. Bien qu’ils ne représentent que 15 % de l’échantillon total, ils concentrent à eux seuls 25 % des cas positifs au cannabis, 31 % des cas positifs à la cocaïne et 18 % des cas positifs à l’alcool.
À titre de comparaison, les salariés en contrat (CDI/CDD), qui représentent 74 % des personnes testées, concentrent 66 % des cas de stupéfiants et 76 % de l’alcool, tandis que les prestataires et sous-traitants (11 %) totalisent 9 % des stupéfiants et 6 % de l’alcool.
Les données montrent que les dépistages réalisés après 17h enregistrent un taux de positivité à l’alcool multiplié par deux par rapport aux autres plages horaires. Ce phénomène s’accentue sur les équipes de nuit, souvent moins encadrées et plus isolées, où les tests révèlent jusqu’à 1 salarié sur 5 positif sur certains chantiers. La consommation nocturne concerne aussi les stupéfiants : en regroupant les résultats entre 22h et 1h, le taux de positivité moyen aux drogues atteint 5,3 %, bien au-dessus de la moyenne globale. Ces chiffres suggèrent une utilisation des substances comme outil de compensation : pour rester éveillé, tenir physiquement, gérer l’ennui ou simplement s’extraire d’un rythme pénible.
Enfin, la dimension temporelle de l’année révèle une autre tendance : le mois d’octobre enregistre le taux le plus élevé de tests positifs, atteignant 7,2 %. Ce pic saisonnier pourrait s’expliquer par un cumul de fatigue post-rentrée, des pics d’activité dans certains secteurs ou encore une baisse de vigilance organisationnelle à cette période.
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