Les crises et l’inflation favorisent les comportements d’épargne des Français, le plus souvent vers des valeurs traditionnelles, mais aussi avec parfois un certain goût du risque
Comme durant les crises de grande ampleur, l’incertitude créée par la crise sanitaire depuis mars 2020 a conduit les ménages à privilégier l’épargne plutôt que le maintien de leur consommation malgré la dégradation de leur situation financière. L’ampleur du soutien public et de la reprise économique semblaient orienter les ménages vers une normalisation, certes graduelle, de leurs arbitrages entre épargne et consommation mais aussi entre actifs financiers. Le retour de l’inflation puis le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne ont changé la donne et les conduisent à la fois à s’interroger sur leurs choix financiers.
La poussée inflationniste des derniers mois puis son accélération récente ont eu un double impact sur les ménages en réduisant immédiatement leur pouvoir d’achat mais aussi en les amenant à réviser leurs anticipations de niveau de vie futur. Cette perception d’une dégradation de leurs revenus à court et à moyen terme a réactivé leurs réflexes d’épargne.
Ainsi, malgré la perte de pouvoir d’achat présente et pressentie, les enquêtes de conjoncture successives de l’Insee ont mise en évidence la stabilité, à un niveau historiquement élevé, de l’effort épargne effectivement consenti.
L’immobilier, éternelle valeur refuge
Cette volonté de se prémunir face à l’inflation est toutefois antérieure au conflit : le baromètre Epargne et Placements BPCE/Audirep mené en février montrait que la hausse du coût de la vie se situait au premier rang des motivations d’épargne des Français, 46% d’entre eux, un record depuis début 2020, estimant « ne pas disposer d’une épargne de précaution suffisante face à la crise ».
Sur le fond d’un besoin persistant, et ranimé à chaque crise, de sécuriser l’avenir et d’assurer la réalisation de ses projets de vie de façon autonome, 16% des personnes interrogées disent ne pas avoir les moyens d’épargner. Alors que 88% des Français disent mettre de l’argent de côté ou essayer de le faire s’ils le peuvent, seuls 46% des titulaires de revenus mensuels inférieurs à 1500 € envisagent d’épargner durant les 6 prochains mois.
Pour une minorité de Français, la frustration liée à l’absence d’épargne s’ajoute à celle des renoncements aux rares formes de consommation « plaisir » qu’ils avaient sauvegardées.
La posture majoritaire consiste à préserver autant que possible une épargne de sécurité suffisante pour se protéger des aléas. 57% des Français épargnent moins de 300 € par mois, le plus souvent sur des dépôts à vue et des livrets défiscalisés, même s’ils privilégient l’immobilier quand ils le peuvent. La pierre reste le bien préféré des Français : 64% d’entre eux estiment « qu’il est plus intéressant d’investir dans l’immobilier que dans les placements financiers » et ils anticipent majoritairement une poursuite de la hausse des prix. Cette image est rehaussée par son statut d’actif emblématique de la protection contre l’inflation. Toutefois, les ménages ont le sentiment que la conjoncture est plus favorable à la vente qu’à l’achat : une interrogation implicite sur l’atteinte d’un pic des prix ?
L’arrivée des cryptomonnaies
Parmi les placements sûrs et disponibles privilégiés par la masse des épargnants, la hausse des taux réglementés et la perte de pouvoir d’achat des placements non rémunérés conduit à s’interroger sur la réorientation possible des dépôts à vue vers les livrets notamment. Cependant, même si 31% des Français estiment avoir des sommes inutilisées sur leur compte courant, la sortie de ces encours ne semble pas d’actualité
Une autre attitude, certes minoritaire, émerge dans ce contexte plus inflationniste : la recherche de valorisation pour accéder à un rendement supérieur et éviter la perte de pouvoir d’achat de son patrimoine financier. Elle s’exprime d’abord par une moindre aversion au risque puisque le refus de toute prise de risque dans les placements recule sensiblement en France de 57% en 2019 à 45% en 2022, alors même que la conjoncture boursière n’est plus jugée aussi favorable que l’année précédente. Si une partie des investisseurs traditionnels reste sceptique quant à son maintien sur les marchés boursiers, une catégorie de néo-investisseurs plus jeunes et avec des stratégies plus axées sur la volatilité semble relancer l’actionnariat individuel. C’est ainsi que les cryptomonnaies ont pris une certaine ampleur, leur taux de détention passant de 2 à 7%. Cette diffusion serait néanmoins plus large, en particulier parmi les jeunes puisque 7% des 18-29 ans seraient détenteurs de cryptomonnaies et 16% supplémentaires envisageraient de franchir le pas.
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