TPE-PME : une situation économique favorable mais fragile

Chiffre d’affaires, charges de personnel, taux de marge, endettement, crédit bancaire, trésorerie : tout savoir sur la situation économique des TPE et de PME.

La Banque de France vient de publier son étude annuelle sur la situation des PME, qui inclut pour la première fois les microentreprises. Dans un contexte marqué par la guerre en Ukraine, la hausse des prix énergétiques, la fin des mesures de soutien Covid et la hausse des taux des crédits bancaires, les PME sont restées résilientes – que l’on considère les plus petites d’entre elles, les microentreprises, ou les autres PME, par nature plus solides.

Le nécessaire resserrement des conditions de financement, ainsi que le ralentissement économique en 2023, invitent néanmoins à suivre avec attention la situation financière des PME dans les mois à venir.

 

Chiffre d’affaires : forte hausse

Après le choc d’activité de 2020 lié à la crise Covid, le chiffre d’affaires des microentreprises* augmente fortement en 2022 et pour la deuxième année consécutive : + 13,1% en 2022, après + 12,5% en 2021 et – 2,5% en 2020/

L’évolution est dans l’ensemble semblable pour les PME* avec une hausse de 12,0% en 2022 et de 11,6% en 2021, après un recul de 4,8% en 2020. Plusieurs facteurs participent à cette augmentation. Elle est tout d’abord tirée par le secteur de l’hébergement‑restauration dont le chiffre d’affaires avait lourdement chuté en 2020 et qui se redresse plus tardivement que dans les autres secteurs. Plus largement, la hausse de 2022 s’inscrit dans un contexte de forte inflation, qui se traduit par une montée des prix de vente.

La valeur ajoutée augmente fortement en 2022, aussi bien pour les microentreprises (+ 13,3%) que pour les autres PME. Cette hausse survient par ailleurs dans un contexte de hausse des prix de l’énergie, entamée en 2021 et amplifiée par l’invasion de l’Ukraine en février 2022. Dès lors, la hausse soutenue de la valeur ajoutée suggère que certaines entreprises ont pu répercuter la hausse du coût des intrants dans leurs prix de vente.

Les charges de personnel rebondissent fortement

La masse salariale augmente sensiblement, dans un contexte favorisant les renégociations d’accords salariaux et ayant conduit notamment à quatre revalorisations du Smic entre octobre 2021 et août 2022. Les entreprises françaises ont par ailleurs bénéficié de la réforme des impôts de production, à savoir une baisse des taux de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE), dès l’acompte du 15 juin 2021 7. L’impact de la réforme est cependant limité pour les petites entreprises : les impôts de production des PME (hors microentreprises) reculent de 3,2% en 2021, mais rebondissent de 3,0% en 2022.

Les impôts de production augmentent

Les impôts de production des microentreprises augmentent de 6,1% en 2021 et de 3,5% en 2022. Cela s’explique par le fait que les entreprises avec un chiffre d’affaires inférieur à 500000 euros – très nombreuses chez les PME et a fortiori chez les microentreprises – étaient exemptées de la CVAE avant 2021 et n’ont donc pas bénéficié de la réforme. In fine, l’excédent brut d’exploitation (EBE) des PME (hors microentreprises) augmente de 4,6% en 2022. À l’opposé, l’EBE des microentreprises diminue de 2,6%, notamment du fait de la progression sensible des charges de personnel par rapport à 2021 et, surtout, du fait de la quasi‑disparition des aides du fonds de solidarité en 2022.

 Le taux de marge résiste

Le taux de marge, mesuré par le rapport de l’EBE sur la valeur ajoutée, résiste bien en 2022. Certes, celui des microentreprises recule par rapport à 2021, année où les taux de marge étaient historiquement élevés, mais le taux de marge de 2022 (31%) reste supérieur à celui de l’avant‑crise Covid (27% en 2019). Le taux de marge des autres PME reste quant à lui à un niveau comparable au niveau record de 2021 (environ 25%). Plus largement, au‑delà des variations récentes, le taux de marge des microentreprises est systématiquement supérieur à celui des autres PME (31% en moyenne sur la période 2019‑2022, contre 23%).

L’endettement recule

En raison d’une dette qui varie peu et de capitaux propres qui se renforcent, le ratio de levier brut diminue en 2022 pour la deuxième année consécutive, à la fois pour les microentreprises et les autres PME, et pour tous les secteurs. L’augmentation du taux d’endettement lié à la crise Covid est ainsi effacée. Au total, l’endettement des entreprises, et les risques associés, sont globalement maîtrisés. Plus largement, l’année 2022 est une nouvelle fois marquée par un renforcement sensible des capitaux propres des microentreprises (+ 10%, après + 12% en 2021 et + 8% en 2020) et des autres PME (+ 8%, après + 10% en 2021 et + 5% en 2020)

PGE, la tension retombe

Il n’y a pas d’inquiétude généralisée sur le remboursement des prêts garantis par l’État Les PME sont les principales bénéficiaires des prêts garantis par l’État (PGE). Les microentreprises représentent ainsi 81% des entreprises bénéficiaires et 28% des montants accordés (soit 553800 microentreprises pour 40 milliards d’euros de prêts), tandis que les autres PME représentent 14% des entreprises bénéficiaires et 47% des montants accordés (soit 98900 entreprises pour 68 milliards d’euros) – ministère de l’Économie, 2023. Dans son audition devant la Commission des finances de l’Assemblée nationale en mars 2023, le gouverneur de la Banque de France a rappelé que plus de 95% des entreprises remboursaient correctement leur PGE, de sorte qu’il n’y a pas d’inquiétude généralisée concernant leur remboursement.

Le crédit bancaire s’emballe

Dès la fin 2021, l’Eurosystème a réagi au choc inflationniste par la réorientation de sa politique monétaire. Ce changement a eu un impact majeur sur les conditions d’emprunt des sociétés non financières. Le taux moyen des nouveaux crédits bancaires aux microentreprises a ainsi augmenté de près de 200 points de base sur un an pour atteindre 3,3% en janvier 2023. La hausse est encore plus marquée pour les autres PME, à plus de 230 points de base sur un an, pour atteindre 3,5%. Les enquêtes de la Banque de France montrent, qu’au premier trimestre 2023, l’accès au crédit des PME reste semblable à la situation d’avant crise Covid (Banque de France, 2023). La remontée des taux reste toutefois un point d’attention pour les PME françaises dans les années à venir.

La trésorerie s’érode

Après les hausses record enregistrées entre 2019 et 2021, la trésorerie des PME baisse en 2022, mais reste à un niveau élevé. Dans le détail, la trésorerie médiane des microentreprises, exprimée en jours de chiffre d’affaires, s’établit à 76 jours en 2022, soit 12 jours de moins qu’en 2021 (– 14%), mais 25 jours de plus qu’en 2019 à la veille de la crise Covid (+ 47%). La trésorerie médiane des autres PME ressort à 59 jours en 2022, soit 11 jours de moins qu’en 2021 (– 12%), mais 18 jours de plus qu’en 2019 (+ 44%). L’inflexion de tendance observée en 2022 doit vraisemblablement s’interpréter davantage comme une amorce de normalisation que comme un signal alarmant pour la santé financière des PME françaises.

 

* Les microentreprises sont celles qui, d’une part, occupent moins de 10 personnes et, d’autre part, ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros; Annexe 2 La taille et le secteur d’activité des entreprises . Les petites et moyennes entreprises (PME), hors microentreprises, sont celles qui, d’une part, occupent moins de 250 personnes et, d’autre part, ont un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros, et qui ne sont pas des microentreprises.

 

   

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