Point de bascule pour le commerce

Entre hausse des prix et arbitrages contraints des consommateurs, le commerce indépendant est mis à rude épreuve.

Malgré les efforts d’adaptation déployés par les commerçants indépendants et une volonté affichée des Français de consommer mieux et de soutenir l’économie Française, les chiffres sont là : la situation pour les commerçants n’est pas facile, mais ils tiennent bon. La nouvelle édition de l’Observatoire Ankorstore du Commerce Indépendant, dresse un état des lieux sans détour — et porteur d’enseignements.

« Cet Observatoire est un signal d’alerte, mais aussi un appel. Face aux difficultés, les indépendants tiennent bon. Ce qu’il leur faut aujourd’hui, c’est un soutien clair : celui des consommateurs, bien sûr, mais aussi des décideurs publics. Il ne sert à rien de déplorer une situation. La pérennité des commerces de proximité, véritables moteurs de vie sociale et économique, dépend d’une véritable révolution dans nos comportements et nos politiques locales », déclare  Nicolas d’Audiffret, cofondateur et CEO d’Ankorstore.

Les bonnes intentions n’ont pas résisté aux fins de mois. 58 % des Français estiment que leur pouvoir d’achat a reculé en 2025 (60 % en 2024), tandis que seuls 6 % l’ont vu progresser. Résultat : 86 % déclarent que l’inflation et l’augmentation des prix ont affecté leur consommation.

En réaction, le premier réflexe a été de consommer moins (44 %), le second de se tourner vers les prix les plus bas (42 %). Ces arbitrages renforcent la pression sur les commerces indépendants, pris en étau entre des prix en hausse et une demande qui se rétracte ou se déplace.

 Pourtant, l’attachement aux commerces de quartier demeure. 70 % des Français les fréquentent régulièrement, dont 40 % souvent. Cette fidélité repose avant tout sur la proximité géographique (57 %), mais aussi sur l’accès à une offre plus locale (44 %) ou exclusive (27 %).

Le commerce de proximité sous tension

Un amour à toute épreuve ? Oui et non. À prix égal, 50% des Français préfèrent et restent fidèles aux commerces indépendants contre 36 % qui déclarent se tourner vers la grande distribution (28 % en 2024).

À en croire les professionnels eux-mêmes, le secteur est à la peine. 59 % des commerçants constatent une multiplication des fermetures de commerces dans les centres-villes, contre 56 % l’an dernier et 46 % en 2023. Depuis deux ans, vitrines et façades calfeutrées ponctuent le paysage urbain.

L’inflation reste la principale difficulté : 81 % des commerçants affirment qu’elle impacte toujours autant leur activité, contre 85 % en 2024 et 72 % en 2023. Une légère accalmie, mais sur fond d’incertitudes croissantes. Les résultats ne trompent pas : 64 % des gérants jugent leur situation « tendue », soit 4 points de plus qu’en 2024.

 

Pour pallier la hausse des coûts, 50 % des commerçants ont augmenté leurs prix en 2024, et 37 % prévoient de le faire en 2025. Une stratégie plus subie que choisie, visant à maintenir l’activité à flot. Et elle porte parfois ses fruits : 41 % des professionnels ont réalisé en 2024 un chiffre d’affaires supérieur à celui de 2023, et 15 % un chiffre d’affaires équivalent.

Mais pour beaucoup, cela ne suffit pas. Malgré les arbitrages sur les stocks, l'approvisionnement et l'adaptation à la demande, la tension sur les marges s’accentue, fragilisant la capacité d’investissement et d’innovation, si essentielle pour se différencier face à la grande distribution ou au e-commerce.

L’heure du sursaut salutaire

2025 s’est ouvert sous de nouveaux vents contraires. L’instabilité géopolitique, le retour annoncé de barrières douanières dans certains secteurs, et une consommation encore à la traîne devraient accentuer les fragilités déjà identifiées. Lucides, 88 % des Français redoutent une nouvelle flambée des prix.

Les défis présents et à venir pourraient toutefois être l'occasion d'un sursaut collectif et salutaire. Peu à peu, une dynamique de recentrage s’installe : 63 % des consommateurs envisagent désormais les produits français (40 %) ou européens (23 %), quand 39 % cherchent à éviter les marques américaines ou asiatiques.

La prise de conscience est partagée par les commerçants. 59 % envisagent de réorienter leur stratégie d’approvisionnement vers des circuits européens, plus proches, plus locaux. Pour cause, 40 % sont d’ores et déjà impactés par les premiers effets des droits de douane américains.

« Si les commerçants sont lucides face aux difficultés qu’ils rencontrent, ils ne baissent pas les bras et ont bien conscience du rôle économique et social qui est le leur (98 % pensent qu’ils ont un rôle à jouer dans la redynamisation des centres-villes). Ils sont ainsi 78 % à attendre des mesures des pouvoirs publics pour les aider ! Car le commerce indépendant reste un pilier du tissu social et économique français. Il crée de l’emploi non délocalisable, tisse du lien, structure les territoires. Et il a prouvé, ces dernières décennies, sa capacité d’adaptation », conclut Nicolas d’Audiffret.

   

 

Commentaires

Aucun commentaire

Ecrire un commentaire

Pour écrire un commentaire vous devez vous connecter à votre compte.

Si vous n'avez pas encore de compte nous vous invitons à vous inscrire gratuitement.

A lire