La fin du rattrapage

L’activité s’essouffle, les trésoreries se tendent, les investissement se compliquent. Le rattrapage d’activité d’après crise sanitaire est désormais passé

On a beaucoup parlé dans les sphères gouvernementales et médiatiques de la reprise de l’économie en 2021 et 2022, évoquant un effet de rattrapage post-covid qui devait laisser derrière lui toutes les inquiétudes et les difficultés des entreprises.

Mais il est désormais clair que ce rattrapage s’essouffle très rapidement et que les évidences d’une économie en crise et d’entreprises au bord du gouffre apparaissent au grand jour. Sans même citer la hausse continue et vertigineuse des défaillances d’entreprises, ou les faux-semblants de la création d’entreprise, portée par l’autoentrepreneuriat non créateur d’emplois et de richesses, les indicateurs de l’enquête de conjoncture semestrielle de Bpifrance confirment largement les complications du moment.

L’an dernier, 42 % des TPE-PME misaient sur une hausse d’activité. Elles ne sont plus de 33 % désormais, et encore, avec une augmentation moyenne de 1 %, donc autant dire rien. 21 % prévoient même une baisse d’activité. C’est encore plus vrai dans les entreprises de moins de 10 salariés, dont la majorité table sur une baisse d’activité. Certes, les PME innovantes et internationales conservent des perspectives supérieures à la moyenne, mais elles sont par définition dans un environnement porteur qui n’est pas à la portée de tous.

Carnets de commandes peu garnis

Le ralentissement est généralisé à tous les secteurs d’activité. Le tourisme voit la croissance la plus élevée (+ 8 % anticipé), mais celle-ci est bien moindre que l’an passé, autre signe que le rattrapage n’est plus ce qu’il était. Les émeutes ayant atteint certains centres-villes touristiques, il est en plus à craindre un tassement de l’activité cet été. Industrie et service connaissent un très fort ralentissement de l’activité. Construction, commerce et transport affichent avec une croissance proche de zéro. Le commerce est particulièrement touché par les problèmes de pouvoir d’achat de ménages et la poussée inflationnistes, alors que les dégâts provoqués par les émeutes vont rajouter d’autres soucis. La construction est frappée par les coûts de matériaux et les hausses d’intérêts et le transport souffre du prix des carburants.

Signe parlant du ralentissement, les carnets de commandes se sont tassés au 1er semestre et les chefs d’entreprises ne s’attendent pas à ce qu’ils se regarnissent d’ici la fin de l’année. Les contraintes de production demeurent importantes, dont les questions d’approvisionnement qui freinent l’activité de 40 % des entreprises. Les problèmes de recrutement restent prégnants pour 82 % des dirigeants, et 42 % font part des grandes difficultés pour embaucher, surtout dans le tourisme, la construction, l’industrie.

Marges resserrées

Forcément, les trésoreries subissent les contrecoups de ces dégradations. 25 % des entreprises sont dans une situation difficile à ce chapitre. Et tout indique que les prochains mois vont être du même acabit. Ainsi, les PGE qui pouvaient devenir des variables d’ajustement face aux soubresauts de l’activité vont retrouver leur rôle de volet de sécurité financière. La montée du taux d’utilisation du PGE se poursuit. Certes, seules 4 % des TPE-PME affichent des craintes quant au non-remboursement du prêt, mais le PGE reste justement un prêt dont il faudra bien s’acquitter un jour, ce qui risque de s'avérer problématique dans une situation d’activité ralentie. Les entreprises ont pu aussi actionner le levier de la hausse des prix, en raison de l’inflation. Mais cette stratégie commence à ne plus pouvoir tenir, les consommateurs ou les clients n’arrivant pas à suivre. 52 % des TPE-PME ont augmenté leurs prix de vente au 1er semestre contre 72 % en 2022. Donc la défense des marges va devenir de plus en plus difficile puisque l’inflation ne diminue pas. D’autant plus que 77 % des TPE-PME ont effectué des hausses de salaire.

Même l’investissement, qui se portait relativement bien, va lui aussi se tarir. Les taux d’intérêt ont très fortement augmenté dans un contexte de durcissement de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne. On était à un taux de crédit aux TPE-PME de 1,5 % à plus de 4 %. C’est donc un obstacle majeur pour l’investissement, tout autant que la faiblesse de la demande, qui reste endémique. 43 % des TPE-PME vont investir cette année, en baisse par rapport à l’année dernière, une statistique portée par l’industrie, plus ou moins contrainte et forcée d’aller vers les investissements verts.

Pour 2024, les patrons font preuve de toujours peu de confiance et entrevoient une poursuite du ralentissement de l’activité, avec des dégradations toujours plus fortes dans la construction, les services et l’industrie, le commerce.

   

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