France, champion d’Europe des prélèvements…

En France, on vous félicite d’« oser entreprendre ». Mais dès que vous commencez à créer de la richesse, l’État et la sécu se servent en premier. Pendant ce temps, vos concurrents européens, eux, avancent plus légers. Même marché, mêmes clients… mais pas les mêmes règles du jeu.

TPE françaises : fiscalité maxi, concurrence européenne dopée

Les derniers chiffres d’Eurostat sont clairs : la France détient le record européen du taux de prélèvements obligatoires, avec 45,6 % du PIB en impôts et cotisations, quand la moyenne de l’UE tourne autour de 40 %. À l’autre extrême, l’Irlande est à 22,7 %.

En langage TPE, ça veut dire quoi ?

  • Pour 100 € de richesse créée, plus de 45 € partent à la collectivité.
  • Vous devez payer cotisations, taxes, TVA, CFE… avant même de penser à investir, embaucher ou vous verser un salaire digne de ce nom.

On peut défendre ce modèle social. Mais on ne peut pas faire semblant d’ignorer qui le finance au quotidien : ce sont vos devis, vos factures, vos heures sup non payées, vos nuits blanches.

Dépense publique record : votre marge sert de carburant

Dernier bilan de la Banque de France : en 2023, la dépense publique française atteint 57 % du PIB, niveau le plus élevé de la zone euro. La moyenne des voisins ? 49,5 %.

L’Insee ajoute que pour 2024, la France affiche un déficit public de 5,8 % du PIB, avec une dépense toujours autour de 57 % et un taux de prélèvements à 42,8 % du PIB.

Traduction :

  • on dépense plus que nos voisins,
  • on est déjà tout en haut du classement des taxes,
  • et malgré ça, les comptes sont dans le rouge.

Quand l’État cherche où trouver de nouvelles recettes, il ne va pas les chercher chez ceux qui n’existent pas encore. Il les trouve chez vous, ceux qui ont déjà pignon sur rue, un SIRET, un compte pro et un terminal CB.

Coût du travail : vous jouez en Ligue des champions

Côté coût du travail, même scénario. Les données compilées à partir d’Eurostat montrent que le coût horaire moyen du travail en France atteint environ 43,7 €, quasiment au niveau de l’Allemagne (43,4 €), mais très loin de l’Espagne (25,5 €) ou de l’Italie (30,9 €). La moyenne de l’UE tourne autour de 31–32 €.

Concrètement, pour vous patron de TPE :

  • un salarié payé au niveau d’un SMIC ou un peu plus vous coûte vite le double une fois additionnées les cotisations,
  • face à un concurrent espagnol ou portugais, vous partez avec 15 à 20 € de coût horaire en plus sur la même prestation,
  • chaque embauche est un pari, et le moindre trou de chiffre d’affaires vous met en stress de trésorerie.

On vous répète que « le coût du travail a baissé ». Sur le terrain, ce que vous voyez surtout, c’est que chaque CDI est une marche qu’il faut monter en apnée.

Les impôts de production : cette bizarrerie made in France

Autre spécialité française : les impôts de production (CFE, CVAE, taxes assises sur la masse salariale, etc.). Contrairement à l’impôt sur les sociétés, ces taxes frappent même si vous ne faites pas de bénéfice.

D’après le European Production Tax Barometer de l’Institut Montaigne, le poids de ces impôts représente environ 4 % du PIB en France, soit deux fois la médiane des pays européens étudiés (2 %).

Vous avez bien lu :

  • là où beaucoup de pays taxent d’abord les bénéfices,
  • la France taxe d’abord le fait que vous existiez, que vous ayez un local, des salariés, un outil de production.

Pour une TPE, ça signifie :

  • payer la CFE alors que l’année a été mauvaise,
  • supporter des taxes locales et parafiscales qui ne dépendent pas de vos résultats,
  • hésiter à investir ou à embaucher de peur de déclencher une nouvelle couche de fiscalité.

Pendant ce temps-là, que font nos voisins ?

Dans l’UE, le taux moyen de taxes et cotisations tourne autour de 40 % du PIB, et certains pays jouent franchement la carte de la compétitivité fiscale : Irlande à 22,7 %, plusieurs pays d’Europe centrale sous les 30 %.

Beaucoup ont aussi des impôts de production plus légers ou mieux ciblés. La France, elle, cumule :

  • prélèvements globaux parmi les plus élevés,
  • dépense publique record,
  • impôts de production surdimensionnés,
  • coût du travail en haut du tableau européen.

Résultat :

  • même marché unique,
  • mêmes règles européennes,
  • mais dans la course au prix, vos concurrents partent avec 10 mètres d’avance.

Patron de TPE : que faire dans ce match truqué ?

Vous n’avez pas le pouvoir de réécrire le budget de l’État. Mais vous avez quelques leviers, et surtout une voix collective à faire entendre.

1. Utiliser tout ce qui existe (vraiment)

  • Vérifier avec votre expert-comptable tous les dispositifs d’allégement (réductions sur les bas salaires, ZRR, JEI, etc.).
  • Négocier vos cotisations et plans de paiement quand c’est nécessaire : l’Urssaf n’est pas un totem, c’est aussi un organisme qui traite des dossiers humains.

2. Arrêter de subir en silence

  • Remonter vos réalités aux organisations professionnelles, syndicats patronaux et réseaux d’entrepreneurs.
  • Quand une réforme « pro-entreprise » est annoncée, demander noir sur blanc ce que cela change pour une boîte à moins de 10 salariés.

3. Exiger de la visibilité
Le vrai poison pour une TPE, ce n’est pas seulement le niveau des charges, c’est leur instabilité permanente :

  • lois de finances qui bougent tous les ans,
  • dispositifs temporaires qui s’arrêtent pile l’année où vous en auriez besoin,
  • promesses de suppression d’impôts de production repoussées de budget en budget.

Collectivement, il faut imposer une idée simple : pas de nouvelle taxe, pas de nouveau dispositif, sans garantie de stabilité pluriannuelle pour les TPE (5 ans, au minimum). Sinon, impossible de planifier un investissement ou une embauche sereinement.

 

Conclusion : ne plus être une ligne budgétaire anonyme

Aujourd’hui, la France affiche :

  • dépense publique parmi les plus élevées d’Europe,
  • déficit qui flirte avec 6 % du PIB,
  • taux de prélèvements record,
  • coût du travail dans le haut du panier européen.

Et pourtant, quand on parle de « réformes », on cible rarement ce qui écrase le plus les petites structures. Les TPE restent les grandes oubliées des débats, coincées entre la théorie macroéconomique et les slogans politiques.

Votre rôle, à vous patrons de TPE, n’est pas seulement de tenir votre boîte à flot. C’est aussi :

  • de faire remonter vos chiffres, vos cas concrets, vos galères de trésorerie,
  • de soutenir les structures qui se battent pour une fiscalité plus lisible et plus équitable,
  • de refuser qu’on parle de « l’entreprise » comme d’un bloc uniforme où un commerce de quartier pèserait autant qu’un groupe du CAC 40.

 

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